L’investissement, notre priorité stratégique
La question de l’investissement est revenue au cœur du débat public de ces derniers jours avec le congrès de la Centrale patronale qui vient de désigner une nouvelle direction pour la représenter au cours des prochaines années. La question de l’investissement et de sa nécessaire relance afin d’en faire la locomotive pour sortir de la crise actuelle a accaparé l’attention. Le Chef du gouvernement a saisi cette occasion pour annoncer une série de mesures à même de réduire le poids de l’administration et d’une bureaucratie tatillonne et encourager les investisseurs à sortir de leur attentisme.
Il faut dire que notre économie a connu un recul de l’investissement depuis plusieurs années et cette baisse est bien antérieure à la Révolution, même si sa cadence s’est accélérée depuis. En effet, la croissance annuelle de l’investissement a commencé à décélérer dès 2007, passant en dessous d’une croissance annuelle inférieure à 10% en 2010 pour descendre en dessous de 3% en 2015. Cette baisse de la croissance annuelle de l’investissement a été à l’origine d’une dégradation rapide du taux d’investissement qui a perdu 5 points en six ans, passant de près de 25% à moins de 20% du PIB entre 2010 et 2016. Mais, plus important, les investisseurs internationaux ont suivi les investisseurs nationaux dans leur attentisme.
Plusieurs raisons sont à l’origine de ce recul de l’investissement dont, bien évidemment, la grande incertitude et la grande inquiétude sur l’avenir que les troubles et l’instabilité post-révolution ont initiées. L’environnement des affaires et la mainmise étouffante de la bureaucratie sur les décisions d’investissement n’ont pas encouragé les investisseurs et ont renforcé cet attentisme. Plusieurs rapports des institutions internationales et notamment le rapport sur la compétitivité de Davos, ont souligné les limites de l’environnement des affaires et des entreprises.
Ce recul de l’investissement a eu, bien évidemment, des effets négatifs sur la croissance et l’emploi. La consommation est devenue la locomotive de l’investissement avec les déséquilibres qu’elle a pu engendrer, notamment la montée de l’inflation et les déséquilibres de la balance externe suite à la montée des importations.
Il est temps que l’investissement retrouve sa place stratégique et redevienne le cœur et la locomotive de l’économie. Ceci suppose des actions audacieuses et vigoureuses afin de relever les défis qui pèsent sur l’investissement.
Le premier défi concerne l’arsenal juridique et institutionnel de l’investissement. Certes, le nouveau code d’investissement constitue un important progrès par rapport aux précédents dans la mesure où il a réduit un grand nombre de démarches administratives. Mais, de l’avis de tous, des améliorations sont encore possibles afin de réduire le poids de la bureaucratie et libérer un peu plus les énergies des investisseurs. Les questions liées aux délais de création d’entreprises et aux différentes étapes sont devenues de véritables parcours du combattant qu’il est important de réduire.
Mais, l’amélioration de l’environnement de l’investissement passe par d’importants progrès dans le domaine logistique, comme le raccordement à l’électricité ou l’octroi d’autorisations de construction. Il faut aussi souligner l’environnement juridique et des questions comme le transfert de propriété, la protection des investisseurs, l’exécution des contrats ou le règlement de l’insolvabilité qui pèsent lourdement sur les investisseurs.
La question de l’investissement pose aussi la problématique du financement et de l’accès au système bancaire et aux institutions financières où de grandes difficultés persistent, particulièrement dans ce contexte d’instabilité politique et économique qui n’est pas favorable à la prise de risque.
Ces entraves et ces difficultés posent d’importants défis et expliquent l’attentisme des investisseurs. Pour l’ensemble de ces raisons, nous devons en faire une question stratégique et réunir toutes les conditions pour un véritable renouveau et un départ de l’investissement.